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Versailles de Pierre Schoeller

Après quelques de jours de visionnage de films, de lectures et de découvertes musicales, Jojo revient aujourd'hui pour une chronique "cinéma" concernant un film passionnant, un drame bouleversant qui interpelle, peinture contemporaine de notre pays en crise.

On parle beaucoup en ce moment de "Depardieu père" plus pour ses problèmes d'impôts et ses acoquinements politiques douteux, que pour ce qu'il sait être parfois dans certains films, c'est à dire un acteur de qualité (Les Valseuses, Je préfère qu'on reste amis, Mammuth ...) . Et pourtant, dans le clan Depardieu, il y avait aussi le fils, Guillaume, personnalité complexe, de santé fragile et effacé par le succès de son géniteur, et surtout, trop tôt disparu. Plusieurs occasions nous ont été donnés de le voir en tant qu'acteur (il a tourné dans 29 films au total et pour la télévision également), et une des dernières se trouve dans Versailles, un des ultimes films dans lequel il a tourné.

Versailles est le deuxième long-métrage de Pierre Schoeller (a suivi en 2011 le film l'Exercice de l'Etat ayant obtenu un César du meilleur scénario). Dans le Paris contemporain, où l'opulence d'une minorité côtoie une réelle misère humaine, Nina (Judith Chemla) erre dans les rues , sans le sou, sans travail, et surtout avec son fils Enzo, 5 ans (Max Baissette de Malglave, jeune acteur complètement étonnant et émouvant, sidérant de justesse !). Baladés de foyers et de villes en villes, dépannés pour une nuit dans un centre (lorsqu'il y a de la place !), perdus, Nina ne se laisse pas marcher sur les pieds même si on sent sa souffrance et un poids intérieur. Débarqués dans un Versailles qu'ils ne connaissent pas, Nina et Enzo, alors qu'ils cherchent leur chemin dans les forêts proches du château, vont tomber nez à nez avec Damien (Guillaume Depardieu, exemplaire !), marginal révolté au passé morcelé, vivant dans sa cabane à l'écart du monde et du matérialisme ambiant. Les accueillant pour une nuit, Damien se retrouvera finalement seul au matin...avec ce petit Enzo que sa mère a laissé là dans l'intention de venir le récupérer plus tard (on ne peut pas parler d'abandon, le film le souligne assez justement d'ailleurs). Pas habitué aux enfants, autoritaire et bougon, Damien va pourtant s'attacher à ce petit bout à un point extrême, au point où lui-même va grandir, mûrir et faire face à des responsabilités auxquelles il ne s'attendait pas....pour disparaître mystérieusement quelques temps plus tard lui aussi.

A la fois critique sociale (difficultés de trouver un emploi, société individualiste, manque de moyens des logements sociaux et lourdeurs grotesques de l'administration) et quête initiatique de l'être (l'apprentissage d'une paternité, de liens particuliers), ce film permet de mesurer le talent d'acteur de Guillaume Depardieu à sa juste valeur. Film pudique, sans pathos, où même les acteurs secondaires tiennent une place cruciale (Aure Atika et Patrick Descamps, très bons), Versailles se caractérise aussi par la justesse des dialogues, à la fois contemporain, épurés et souvent vifs. Il s'en dégage un lyrisme surprenant. Et nous conforte dans l'idée, qu'en France, il existe encore aujourd'hui de petits-chefs d'oeuvre, dont la qualité ne se mesure pas forcément au nombre de spectateurs (128 123 entrées seulement en 2008 à sa sortie, source Allociné). A redécouvrir absolument en DVD.

Baromètre "Coup de Coeur" : Chef d'oeuvre !

Alire aussi : la page Wikipédia de Guillaume Depardieu, assez complète !

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